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Laurent Obertone - La France Big Brother

20 Août 2015 , Rédigé par Christian Adam

Laurent Obertone - La France Big Brother

« C’est Moi qui t’ai habitué à ta vie sans espace ni liberté, de ton lit au métro, de ton bureau au centre commercial, dans les couloirs, les rues, sur les rails et les voies. C’est Moi qui ai fait ton environnement, qui te fait chaque jour avaler des goulées d’air saturé de polluants et d’odeurs organiques. C’est Moi qui contrôle la dilution des âmes dans le grondement des rames, les portes automatiques, les respirations métalliques, les grincements pneumatiques, l’air chaud chassé dans les tunnels où tu croises, dans ta solitude pressée, le flux de tes frères damnés, ces milliers de visages incohérents que je te condamne chaque jour à affronter. C’est Moi qui te pousse dans ce grouillement malodorant, parmi ces corps infâmes et répugnants, ces chairs exhibées et ces visages défaits. Identités morbides et stratifiées de tes semblables, multitude dégénérée que je t’ai appris à nommer tissu social, qui se mortifie dans le stress bruyant et perpétuel, dans cet univers angoissant où rien ne te paraît stable et logique. Où rien n’a vraiment de sens. Et malgré tout tu continues à faire exactement ce que je t’ordonne de faire. Tu respectes mes lois, tu obéis à mes commandements. Tu vas passer ta vie entière à travailler pour Moi. Tout ce que tu vas gagner et tout ce que tu vas dépenser, d’une manière ou d’une autre, me reviendra. » (21)

« As-tu une idée de ce qu’ils penseraient de toi, s’ils te voyaient, avec tes cafés, tes clopes, ton clavier, ton acharnement stérile, ton événementiel, tes petites tâches idiotes, ta vie sans risque, sans enjeu, sans conséquence ? Et de la lâcheté que je t’ai enseignée, que penseraient-ils, dis-moi ? Te rends-tu compte que dans ta lignée, des hommes ont tué pour que toi, misérable cloporte raseur de murs, aies le droit de vivre ? » (22)

« Mais avant tout, tu es l’être de la dépendance. Ton ancêtre Cro-Magnon avait ses outils, ses muscles, son courage, sa solidarité pour gérer des conditions de vie auxquelles tu ne survivrais pas deux jours. Tu as ton ostéoporose, ton diabète, ton cholestérol, ta pendule de bureau, tes crèches, tes promotions, tes réclamations, tes plaintes, tes boîtes vocales et tes lettres recommandées avec accusé de réception. Tu hurles lorsque tu patientes plus de quinze minutes au restaurant. Tu n’imagines pas pouvoir te dispenser de brosse à dents, ou passer une nuit à la belle étoile. Rien ne t’irrite tant que l’achat d’un gadget défectueux, qu’un retard dans le ramassage de tes ordures ou qu’une panne de téléviseur. Tu ne connais que la satiété, une température constante, des assises confortables. Ton premier réflexe en cas d’imprévu est d’appeler à ton secours une « autorité compétente ». Tu as abdiqué ton autonomie et ton intelligence à un assistanat fait de directives, de notices et de règlements. Ta capacité à admettre sans réserve l’autorité d’autres personnes, de « spécialistes », laisse à tes maîtres toute latitude pour faire de toi ce qu’ils veulent. » (35-36)

« Pour supporter ta vie de cinglé, pour ne pas être rattrapé par le silence et la solitude, tu t’occupes, cumules des habitudes et des dépendances, des substituts de travaux nommés loisirs, dont tu ne peux te défaire tant ils sont devenus la clé de ton équilibre psychique. Dès que tu parviens, par une planification de stratège, à te dégager un peu de temps entre tes ablutions, tes repas, ton travail, tes déplacements, tes affaires administratives, ta vie de couple et ta famille, tu t’empresses de t’assourdir de musique, de t’aveugler de télévision, de t’abrutir en boîte de nuit, aux concerts et aux fêtes, tu t’assommes l’âme par le bruit permanent, celui de la masse, de mon verbiage médiatique, de ma publicité, de mes spectacles, de ma propagande, de mon divertissement, de tout ce qu’on nomme prolealiment en novlangue. T’éclater, te vider la tête, te déchirer… plutôt que te regarder en face. Vomir et oublier. Accélérer le processus. Travail et divertissement sont des comportements d’évitement, de fuite. » (38)

« Tu entres dans un état d’angoisse panique quand tu perds ton téléphone. Tu joues le jeu des files d’attente pour être parmi les premiers à te payer le dernier gadget de marque censé prouver que tu appartiens à une race supérieure. Tu te bats pour les produits soldés, tu fais des crises dans les magasins, tu te fais suivre pour réfréner tes achats compulsifs. Tu es prêt à tout pour défendre tes droits, ou plutôt, tes aliénations. Tu es parfait. Il te va comme un gant, ce monde décrit par Henry Miller, ce monde fait pour les monomaniaques obsédés par l’idée de progrès, mais d’un faux progrès qui pue, ce monde encombré d’objets inutiles qu’on t’a appris à considérer comme utiles, pour mieux t’exploiter et te dégrader. » (40)

« En cas de réel intrusif, un bon journaliste doit avoir le réflexe de pallier son illégitimité en composant les numéros d’experts, toujours les mêmes, affichés sur le mur de son bureau. C’est la dernière étape du cycle de machine à laver médiatique. Le prélavage, c’est l’AFP, les JT, les éditoriaux. Le lavage c’est la presse. Le rinçage c’est l’humiliation par les « chroniqueurs » et le Petit Journal. Enfin arrivent les « spécialistes » pour l’essorage, avec dossier « fouillé », « article de fond » pour « briser les idées reçues », « déconstruire les visions simplistes », « dénoncer les causes réelles des problèmes ». « Les savants d’aujourd’hui sont une mixture de psychologue et d’inquisiteur » (1984). Ce sont les cautions du régime, ou plutôt ses agents d’entretien, qui passent le réel à la javel et tentent de tout faire disparaître, les témoins et les faits. Après leur intervention seulement, on peut te laisser sécher en paix, jusqu’au prochain cycle. » (83-84)

« L’immigration a toujours existé. C’est normal. La délinquance a toujours existé. C’est normal. L’abandon de l’autorité ? Un progrès. La théorie du genre ? Des droits pour les femmes. La famille ? Une construction patriarcale archaïque. Votre souveraineté ? Moins importante que les droits de l’Homme. La diversité ? Une richesse. Le remplacement ? Un fantasme. L’insécurité ? Un sentiment. Votre identité ? Une obscénité. Ne sous-estime pas notre matraquage. Il finira toujours par faire son chemin dans ton crâne. Tu verras, dans deux ou trois ans, tu auras déjà adouci ton opinion sur au moins deux ou trois de ces thématiques. » (87)

« Chaque évènement sportif ou artistique est l’occasion de promouvoir le « vivre ensemble », de rappeler la « force du métissage » ou la « richesse de la diversité ». Tous les jours, des manifestations « culturelles » en font la promotion. Partout, tout le temps, dans tous les discours, tu dois n’entendre que ça, quel que soit le sujet, avec toujours une dose de menace et d’infamie, pour motiver le citoyen rétif, qui finit par développer les bons réflexes, et porter à son tour la bonne parole, menace et infamie comprise. » (136)

« Même Simone de Beauvoir reconnaissait qu’il y avait là un problème fondamental. « Il y a des femmes de talent : aucune n’a cette folie dans le talent qu’on appelle le génie ». Les écoles de pensées sont toutes masculines, les grands penseurs, les grands génies, sont presque tous des hommes. La grande histoire n’a retenu aucune découverte, aucun édifice, aucune composition, aucun system de pensée ou de philosophie d’origine féminine. » (166)

« Vous n’y échappez pas. Tout individu est conditionné à suivre le groupe. « L’évolution des mentalités », c’est un troupeau qui change de direction au gré de la volonté des bergers, par peur de la solitude, des coups de bâton, ou des crocs des mâtins. Vous faites partie de ce troupeau. À des degrés divers, nous sommes tous conditionnés. Vous aussi tenez le bâton invisible. Vous acceptez de modifier vos pensées, de modérer vos avis, de parfois nier votre vision du monde. Vous vous soumettez au politiquement correct. Vous êtes endoctriné. On se ment, on se manipule, on se surveille soi-même. » (219)

« C’est au nom de la dignité humaine qu’on n’enferme plus personne, qu’on ne dispute plus les enfants, qu’on veut piquer les vieux, abolir les frontières, aménager des accès pour personnes à mobilité réduite, donner aux pauvres, taxer les riches, accélérer l’immigration. Tous les êtres humains sont « dignes » de tout exiger de la société, donc de ne plus rien exiger d’eux-mêmes. » (240)

« On scande « nous sommes toutes des guenons » pour soutenir une femme noire, on se félicite de voir des Noirs ramasser et manger dignement des bananes sur des terrains de football, on applaudit les handicapés qui tentent d’imiter les valides, on assure que les races et les sexes n’existent pas et n’ont pas d’importance mais on mesure et déplore des discriminations scandaleuses qu’il convient de discriminer « positivement », la religion est un poison méprisable, en revanche il n’y a rien de plus louable que la religion des droits de l’Homme, on impose notre progrès, nos droits , notre aide et nos mœurs au reste du monde en affirmant que toute culture se vaut et que les autres n’ont jamais eu besoin de nous pour s’en sortir, on prétend « améliorer l’homme » par l’éducation et le métissage tout en exécrant l’eugénisme, on abomine le déterminisme tout en prétendant que « tout est social », on abhorre la peine de mort et on adore l’euthanasie, on assure que la famille est une infernale norme archaïque, mais il faut absolument que tout le monde y ait accès, on vomit l’esclavage et on ne rêve que d’avoir des gens à son service, l’immigration massive qui n’existe pas est une chance qui rapporte car les immigrés qui n’existent pas vont payer nos retraites, nous enrichir comme ils n’ont pas enrichi leur pays d’origine, faire les travaux dont on ne veut pas et remédier à notre basse fécondité, même s’ils sont deux fois plus au chômage que nous, même si nos retraites sont plus impayable que jamais, même si le gouffre de la sécu ne cesse de grandir. » (296-297)

« Les défenseurs du régime, qui haïssent l’intolérance et l’inégalité, se mettent à plusieurs médias pour condamner un seul homme à la mort sociale. Ils luttent pour la dignité mais font tout pour t’humilier. Ils assurent défendre les petites gens, sans jamais s’intéresser à la France périphérique, forcément remplie de beaufs, incultes et racistes. » (301)

« Plus ils vous abrutissent et vous rendent dépendants, plus ils sont puissants [...] Pour le Parti la société cohérente est un danger, comme un troupeau soudé est un danger pour un prédateur. Le prédateur doit isoler les individus, rompre l’immunité sociale, d’abord en supprimant la cellule, les frontières, ensuite, en la détruisant de l’intérieur, par la ville, la morale hors-sol, la pression sociale, l’acculturation et le vivre ensemble, alors seulement le prédateur peut s’attaquer aux individus et les dévorer. » (316)

« Not to get Involved. C’est la clé de la survie urbaine. Faire l’économie de son rôle social. Des individus recroquevillés sur les trottoirs, des agressions sexuelles dans le métro, et l’indifférence, les regards fuyants, les pas pressés de tous ces gens qui se veulent résistants, qui se proclament humanistes et solidaires, si passionnément préoccupés par ceux qui souffrent, pourvu que ce ne soit pas dans leur rame. » (323)

« La charge de dressage que l’homme doit supporter se fait chaque jour plus pesante. la plupart des gens se comportent comme des bêtes de somme, se résignent et subissent, se concentrent sur leur triste sillon, sans perspectives ni ambition.» (323)

« Leur mécontentement ne menait nulle part. Ils ne pouvaient le concentrer que sur des griefs personnels et sans importance. Les maux les plus grands échappaient invariablement à leur attention » (Orwell, 1984) (325)

« Briser notre immunité individuelle. Me voilà emmuré dans les clapiers d’une cité virtuelle et absurde, gavé, dépendant, assigné à une vie de productivité ritualisée et démentielle, allant d’un point de consommation à un autre, courant après l’obsolescence programmée du plaisir, me voilà terrorisé par moi-même, priant pour que la sécu terrasse la réalité, fuyant la pensée par tous les moyens, privé de ma logique, de la nature, d’espace, de calme et de beauté. Me voilà sur des rails, des routes, des passages à gibier, assailli de balises, de pancartes, de conseils, de règlements, abasourdi par un brouhaha de musique, de cris, de publicités, étourdi par un vortex d’images, de couleurs, d’animations, d’appareils, de nouveautés d’informations, tout ce qu’ont su mettre au point nos semblables pour attirer l’attention. Un bombardement continu et insensé qu’aucun cerveau ne peut supporter. » (326-327)

« Avez-vous une idée du nombre d’inconnus que vous croisez chaque jour, dans les ascenseurs, les métros, les salles d’attente, la rue ? De l’épuisement nerveux que ça implique ? Par réaction, la ville nous pousse à nous abstraire de la foule, à mettre en veille notre instinct, à nous déconnecter du réel. Nous déshumanisons les inconnus. Ces milliers de spectres que l’on croise chaque jour n’existent pas […] « Le pire ennemi est le système nerveux » (Orwell, 1984) » (328)

« Il est maintenant établi que la « prospérité humaine » et l’avènement des civilisations résultent d’une baisse des niveaux de testostérone. La « tolérance » s’est accrue avec la technologie. Nous sommes moins agressifs, supportons mieux la promiscuité et la soumission, exactement comme des rats de laboratoire. » (333)

« Les fous traversent la société et sa dictature morale comme des météores, sans essayer le moins du monde de s’y intégrer, avant de finir par se désintégrer en plein vol. Ce sont des mutants sociaux, des erreurs de copie, des ruptures de code. S’en prendre frontalement au système est une sorte de fuite. Terrible lassitude de la société. Impression d’avoir atteint un point de non-retour, où la mort n’est pas plus grave qu’une telle vie. » (341)

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